Planète Vélo

Planète Vélo

CHINE

Mardi 12 Mai 2009

Luang-Prabang(laos)-Jinghong(Yunnan,Chine):115/85/100/120/65 kilomètres soit 485 km en 5 jours. Au poste-frontière,un fonctionnaire zélé et prétentieux me fait stationner trois quart d'heure pour vérification de passeport.Il est vrai que ma photo n'est pas ressemblante,c'est la premiere fois que l'on me prend pour un hors-la-loi.La photocopie de mon permis de conduire me libère de ce tracas très ennuyeux.La chaussée est excellente,de longues descentes succèdent à de longues montées.Montagnes russes grand format.Ca ressemble vaguement au Massif Central français beaucoup de la forêt a été surexploitée.Des versants sont à demi déboisés,les plantations sont extensifs et sans diversité.Sur ma route des dizaines de tunnels perforent l'obstacle naturel,de nombreux viaducs enjambent d'étroites gorges.De la route surélevée j'aperçois des cours d'eau,j'aimerai me rafraichir mais je ne peux pas les rejoindre.Pas d'arrêt possible dans un village pendant trente kilomètres.
 
Je campe dans un bois d'héveas,des boîtes sont suspendues aux troncs pour collecter le latex.Un vieux village isolé aux airs d'antan et ses habitants isolés de la société actuelle m'apportent une bonne détente de juste après étape.J'aime la douceur,la bonhommie,la naïveté des villageois ayant choisi de se tourner vers un passé apprivoisé.Je me délecte des scènes de vie,des cartes postales vivantes de la vieille Chine,une force campagnarde belle propre à l'immense pays me transporte,je suis dépaysé à l'extrême et charmé,je retrouve des images de mes lectures de jeunesse. Jinghong,capitale de la région,des avenues ombragées par des rangées majestueuses de palmiers,des idéogrammes sur les enseignes lumineuses,l'activité sans relâche de la robuste population.Je suis trempé dans un bain de foule à la puissance dix. Didi en Han(ou Hanyu=language Hun),l'idiome d'une majorité des chinois,signifie petit frère.On l'emploie de façon familière lorsque l'on s'adresse à quelqu'un de plus jeune à qui l'on veut signifier de l'affection.Enfant souvent j'étais nomme Didi,je suis heureux en y pensant de me trouver dans le vaste empire du millieu. Jinghong,des hôtels hauts,récents,très tape à l'oeil,plus laids que jolis(pâtisseries de béton armé à l'imagination artistique pauvre),les rues entièrement vouées aux commerces de toutes sortes. La Chine fabrique 2/3 des chaussures du monde,il y en a dans cette seule ville moyenne chinoise pour toute une région de mon pays,insensé de la surproduction et de la surconsommation qui va de paire.Dans un grand bassin d'un parc près du centre ville des centaines de mignons petits poissons argentés se culbutent,se glissent les uns contre les autres,pour avaler des miettes de pain dispersées par un autochtone.Vraiment pittoresque,les chinois avec les petits animaux deviennent tendres.Des joueurs aux longues cartes bizarres,de gros dominos,sont à une place ombragée groupés autour de tables de jardin.
 
Les 650km dans un bus a 40 places couchettes fut un épisode épique et inédit,le plus reposant de tout mes trajets par ce moyen de transport.Les hommes chinois fument beaucoup,même dans un car ils continuent.Ce sont les plus grands pompeurs de la planète.Je regarde defilé le paysage du coin de l'oeil,je lis mon guide de voyage et je dors pour de bon pendant six heures jusqu'à l'arrivée.C'est reparti en vélo,je me sens petit sur les larges avenues,tout les panneaux sont en idéogrammes,je progresse la boussole suspendue autour du cou dans la direction nord.Arrêt pour manger une soupe de nouilles(5 Yuans=0,60E),le plat national.Comment font-ils pour manger ça avec des baguettes?.Les baguettes symbole majeur du grand fossé culturel entre l'Asie et la Chine et le reste du monde.Mannier ces petits bâtons est pour eux enfantin,inné,pratique.Ils naissent avec depuis des temps immémoriaux.J'ai le préssentiment que je quitterai la Chine sans avoir appris à m'en servir,et aussi vais-je réussir à prononcer xiexie(Merci) correctement.La Chine est un pays dans le monde,est un monde à elle seule.
 
Dali est une vieille ville présevée et bien renovée,un oasis pour les visiteurs,son authenticité un peu artificielle fait son succès.Yoan et Antoine,deux francais,vivent en Chine depuis un an,ils étudient le mandarin,sympathiques ils m'apprennent des choses qui me seront essentielles pour mon sejour.Surtout j'ai retenu d'eux qu'il y a très peu de violence,que les larcins et les vols sont assez rares,que l'hospitalité est peu répandue,que le temps de deux mois sur un vélo je ne verrai qu'une petite partie de toutes les bizarreries.Trois musiciens de l'âge de la retraite s'echangent un violon et une contrebasse et une flûte et une guitare.Ils jouent avec joie et ferveur,sont poétiques.Je m'essaye à la contrebasse,une première,l'experince avec l'archet est plutôt réussie,je produis quelque chose de mélodieux.
 
   Des deux côtés de la route à perte de vue des rizières,des paysans des deux sexes,chapeaux ronds du pays vissés sur la tête,aux habits bariolés,plantent,plantent,toujours.Des milliers de courageux s'activent par petits groupes de compagnie.Des motoculteurs,drôles d'engins,les roues de fer hérissées de pointes retournent le sol inondé.C'est les premiers lacets de longues ascensions sur deux jours,des véhicules crachent une immonde fumée noîratre,chaque fois qu'un me double je suis gazéifié.Quand le gouvernement interdira-t'il des mécaniques déglinguées de rouler?.Dans ma chambre d'hôtel je zape la télé,toutes les chaînes sont chinoises,après le pays sur le vélo,le même devant un petit écran,je coupe pour dormir.La Chine me bouleverse,il faut que mes impressions mûrissent pour que je me sente plus à l'aise.
 
Des jeunes filles uniques,résultat de la politique "un enfant par famille" s'activent à la cuisine de l'hôtel.Elles sont drôles,vives,pleines de chinoiseries.Elles m'invitent  à leur table basse à partager un plat de légumes avec viande en sauce et riz blanc.L'on fait semblant de se comprendre,toutes elles ne parlent que leur language.Les enfants chinois travaillent beaucoup et sérieusement à l'école pour acquérir l'emploi des idéogrammes,trois mille pour connaître suffisemment bien la langue et bien plus pour devenir un lettré.Ce sont le fondement de la culture de tout un immense peuple.Une seule façon de réellement s'adapter,apprendre à déchiffrer,à lire et à ecrire les idéogrammes.Pour le simple voyageur,la mission est impossible. Trente kilomètres de montée,des averses,comment je tiens le coup?Mes jambes de cycliste sont les oreilles d'un musicien,les yeux d'un photographe,les poumons d'un nageur.Elles me font narcissique tant je suis fier de leurs rotations de longues durées.Je suis à 3500m d'altitude,je ne transpire pas,un demi bidon d'eau m'a suffit pour l'étape.Quel changement avec mes jours en Indochine où je m'aspergeais d'eau,où je buvais plus de dix litres. Le vent est très frais,je grelotte dans les courtes descentes,c'est la première fois depuis le depart de ce voyage.
 
Didier se réfugie pour la nuit sur le plancher d'un vieux chalet qui a bien résisté aux assauts du temps.Il se couvre davantage avec des effets de réserve sortis du fond des sacoches:tricots,gants de soie,collants,chaussettes.En bon aventurier prévoyant il passe une nuit chaude et confortable.
Pendant quarante kilomètres le vent souffle fort de face,c'est l'ennemi juré.Le vélovoyageur a beaucoup entamé ses réserves,c'est terriblement dur. Dans les montagnes des ethnies d'origines differentes se sont établies et dispersées au fil des siècles,c'est un creuset de l'Asie interieure.Il arrive rompu,usé,fourbu,crevé,à bout,cuit,sèché,decomposé mais avec la folle joie très particulière du nomade à vélo.
 
Trouver sa route c'est comme chercher une aiguille dans une botte de foin,toutes les indications routières sont écrites en idéogrammes,sauf quelques unes traduites en anglais qu'il ne trouve jamais sur sa carte.Une jungle sans danger!.Il avance en regardant sa boussole,pensant qu'il n'est pas sur la bonne route,trois heures plus loin il réalise heureux que si.Maintenat il pédale à vive allure,le moral au beau fixe. Au Tibet chinois,c'est à dire à l'extrémité est des chaînes de l'himalaya,faisant partie d'un territoire plus étendu que celui revendiqué et annexé par la Chine en 1950,qui alors appartient à l'empire Du Milieu,sur la grande place quadrangulaire de la cité ancienne de Zhongdian chaque soir avant le crépuscule plus de cent montagnards,femmes et hommes ayant dépassé l'âge de la première jeunesse,se retrouvent en robes et costumes vivement colorés pour un spectacle de danse à l'unisson.Au son et rythme de la musique,ils forment une ronde et tournent dans le sens des aiguilles d'une horloge.Ils moulinent des bras,tape des pieds,restent droits et se plient le corps en deux dans une direction puis dans une autre opposée,hochent de la tête,se secouent le dos.Ce spectacle populaire offert pour le plaisir de tous est vraiment magnifique.Les touristes parsemés dans la foule sont charmés.Les autochtones fier de leur identité offrent en partage leurs traditions.Ces danseurs sont naturels et sincères,je les trouve drôles.J'apprécie,je réfréne des rires bruyants,ce carnaval est follement amusant.
 
Zhongdian(Yunnan)-Litang(Sichuan),82/33/100km de bus/83/123 kilomètres: Des hautes cimes de plus de 6000 mètres l'entourent minuscule vélovoyageur dans l'Himalaya.Zhongdian est à majorité chinoise,les constructions sont la plupart récentes,résultat des grands chantiers du dynamique et puissant pays.Mais Litang est tibétaine,le temps y a deposé décadence et noblesse.C'es la ville natale des septième et dixième dalaïs-lamas.C'est le berceau d'un récit fondateur du Tibet.Les trente premier kilomètres depuis Zhongdian sur la petite route asphaltée sont un régal,le soleil irradie,l'air est tonifiant,les villages sont beaux,il y a des grandes villas construites avec des gros blocs de pierre grises claires,les auvents sont sculptés avec magnificence,l'extrémité des poutres est peintes en rouge et blanc,des terrasses sont utilisées pour sècher les récoltes et récupérer l'eau de pluie dans des cuves.Les cours d'eau s'écoulent impétueux,les petits pins sont ornés de pommes.Le relief montagneux est éblouissant,il donne des formes,des contours,des lignes,des dessins multiples,apportent des impressions et des sensations intenses,mémorables.Maintenant il continue son itinéraire sur une route pierreuse et poussièreuse.Ca monte en longs lacets qui apparaîssent tels des cicatrices dans l'énorme masse.Le parcours est pendant quelques miles un enfer pour cycliste.Le vélo secoue,dérape,les camions le font disparaitre dans la poussière.Au bas d'une étroite vallée une rivière déssine d'imposants méandres.Il y a un village de montagnards,il stoppe là fourbu par les cahots de son trajet à l'auberge qui appartient au maire.Deux énormes cochons en partie engraissés aux excréments humain sont parqués derrière le mur de la fenêtre de sa chambre.Ca sent fort l'odeur de l'animal.Aujourd'hui il fête ses quarante cinq ans et il mange de la couenne bouillie,drôle de gâteau d'anniversaire.En soirée il picole de l'alcool fort de riz avec des hommes du village,il n'arrivera pas à repartir demain.Didier parvient à communiquer avec les indigènes,dont pas un seul ne sait un simple rudiment d'anglais,avec son guide de conversation où des idéogrammes sont traduits et avec l'art du geste évocateur.Vivent ici une majorité de chinois,des birmans,des tibétains et d'autres,il ne voit pas vraiment de distinction entre eux,mais sa lucidité est celle d'un cycliste qui cravache et qui tient le coup grâce à une magie des hautes montagnes.Bon nombre d'entre eux au village sont des retraités qui ont choisi de se retirer loin de la société. Il stationnera trois jours dans ce patelin hors du monde,presque hors du temps Il se souviendra très longtemps des cocasseries de là-bas,de son pittoresque total.Un couple de vieux tibétains l'invite à les suivre chez eux.Leurs visages burinés irradient la douceur bucolique de leurs existences.Leur habitation fait davantage penser à un hangar qu'à une maison.Au rez de chaussée se trouve l'écurie où l'on s'occupe des yaks et les ateliers où l'on coupe,taille et façonne le bois.Pour accéder à l'étage il faut emprunter un escalier abrupte de planches et de pierres.Une seule salle sombre avec un plancher mal ajusté et des murs irréguliers de pierres.Au centre un haut poêle où des flammes éclairent.Le couple lui propose de s'asseoir sur un sofa de fabrication locale et pose devant lui du beurre de yak salé fondu,du fromage fabriqué avec le même lait,de la farine fine d'orge et du thé au beurre salé.Il se réjouit de ce repas typiquement tibétain.La sentence "les choses les plus simples sont les meilleures"est une belle évidence à cet instant où il ressent être plus que seulement sur notre planète.
  Je quitte le village en mini bus bondé à déborder,surchargé à passer dessous.Comment un homme a-t'il réussi à poser le vélo en haut du tas de bagages démesuré sur le toit?.Les mauvais effets de l'excès d'alcool de riz persistent encore,j'ai la tête comme une cocotte.A Xiangchang j'opère un retour dans la civilisation chinoise,la petite bourgeoisie divague dans les rues avec ostentation.Je passe la nuit dans le dortoir d'une extraordinaire demeure tibétaine.Ce sont parmi les plus originales et les mieux décorées de la planète.La tapisserie de mille motifs,les panneaux de bois taillés,ciselés,ajourés,polis,vernis,représentent des idées symboliques,des leçons bouddhiques,la profusion du travail des artisans et des artistes m'enchantent et me plongent dans un sommeil serein.
   Deux étapes sur le vélo le regard aimanté par les montagnes himalayennes du Sichuan,si belles que parfois magiques à mon esprit.Je ne sens plus mes forces,je suis dopé par l'espace grandiose.Ces cimes ont une respiration,une âme.Là vivent des Pandas géants.Hélas je n'en verrai pas,ils restent dans les forêts d'altitude.Ils peuvent peser jusqu'à cent vingt-cinq kilos et mesurer jusqu'à cent quatre-vingt centimètres.Leur pelage épais noir et blanc les protège du froid.Ce sont des herbivores avec des dents puissantes pour broyer le bambou. 
   Trente-cinq kilomètres de montée non-stop,trois heures quarante cinq minutes sans pause autres que celles pipi,remplissage du bidon avec la grosse boueille en plastique et vérification inutile du gonflage des pneus en appuyant dessus avec le pouce.J'apperçois plus haut au loin la route,il est difficile de deviner la distance pour rejoindre le point le plus éloigné de ma vue,la perspective et les détours de la voie sont trompeurs.Le compteur n'affiche pas souvent plus de huit kilomètres à l'heure.Le col passe à 5117 mètres,jamais je ne suis monté si haut sur ma selle.Beauté du voyage et de la liberté,bonheur du sport,splendeur du panorama:Instants de félicité au plus haut point de toutes mes routes,descendu de ma reine je photographie dans le vent frais,je m'agite heureux et tremble par le refroidissement commençant de mon corps et de joie.Lors de la longue redescente à petite allure,j'utilise beaucoup mes freins et me laisse envoûté par les paysages immenses.J'ai rejoint un plateau et un village tibétain,là je rencontre Alison vingt-six ans,une canadienne de la région de Vancouver.Pareil à moi elle a quitté Xiangchang ce matin.Elle a acheté son vélo tout terrain à Hong Kong,les bagages et le matériel aussi.C'est son premier voyage vélo,elle manque d'expérience et son équipement est de moyenne qualité mais cette ancienne hokeyeuse sur glace est forte et résistante.On mange ensemble ici des nouilles,du riz,des sardines en boite,des biscuits et des verres de thé au beurre salé.Alison à pour objectif de se rendre au Pakistan sans passer par le Tibet car elle n'a pas le permis d'entrée.Elle passera donc plus au nord du pays.Le lendemain matin la jeune canadienne quitte le lodge dix minutes avant mon départ,je pense la rejoindre en cours de route.Je me suis trompé ne l'ayant pas même apperçu au loin devant sur l'asphalte.L'on se revoit le jour d'après dans les rues de Litang.Bonne voyage Alison!.Le plateau lunaire à 4000 mètres est parsemé d'énormes cailloux qui font penser à des petites météorites,mon esprit capte des vibrations étranges,fortes et même troublantes.Il y a là des secrets indéchiffrables pour l'être humain.Plusieurs kilomètres avec ma belle solitude sur la petite route qui dessine un ruban flottant au vent.Un fourgon stoppe à ma vue,six  touristes chinois à peine trentenaires avec des gros appareils-photo suspendus à leurs cous veulent me prendre,je suis fier d'être reconnu comme un aventurier digne d'intéresser le monde.Ils m'offrent une tasse de thé qui me brûle les lèvres et transmet à mon corps échauffés des légers tremblements agréables.C'est un jour heureux,le vent me pousse,les rayons du soleil s'échappent par les troués des gros nuages cotonneux qui s'éffilochent.Les petits yaks près de la route sont d'adorables bébés animals. Litang est le plus tibétain des bourgs de la région,tout les aspects d'une culture se sont donnes rendez-vous là pour célébrer,préserver ou renforcer les plus hautes en altitude traditions de la terre.Voyez: www.tibet


15/01/2013
0 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 21 autres membres